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|Description=Exploration à deux voix de la construction de droit(s) basé(s) sur les communs
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|Auteur=HELFRICH Silke, SULTAN Frédéric
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'''Proposition pour le Sommet des Peuples Rio+20 présentée par GT Commons, FST'''  
'''Proposition pour le Sommet des Peuples Rio+20 présentée par GT Commons, FST'''  


Contacts : Fréderic Sultan : fredericsultan/at/gmail.com et HELFRICH Silke : Silke.Helfrich/at/gmx.de
Contacts : Fréderic Sultan : fredericsultan/at/remixthecommons.org
 
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Dernière version du 29 août 2022 à 14:48

Exploration à deux voix de la construction de droit(s) basé(s) sur les communs

Enjeu(x) : Droit des communs  Action(s) : Politiques des communs  


Métadonnées

Auteur(s) HELFRICH Silke, SULTAN Frédéric
Média Article


Ce texte s'inspire de deux sources : les droits à la communication, pour lesquels les activistes de la communication se sont engagés depuis les années 60, pour la hiérarchie et la catégorisation des droits des biens communs, l'expérience des droits culturels économiques et sociaux et de la bataille perpétuelle pour faire reconnaître aux Etats et aux firmes leurs obligations vis à vis des populations concernées par les effets de leurs activités, pour la description des processus de mise en oeuvre des droits des biens communs.

Le texte suivant a été rédigé dans le cadre de la préparation du Sommet des peuples de Rio+20. Les trois étapes qui ont amené à ce texte sont :

  • la rencontre avec Nicolas Krauzs, membre de l'équipe de la Fondation pour le Progrès de l'Homme, en juin 2011, lors de la réunion du Collectif Rio+20 français, qui a questionné le lien entre Biens communs et développement.
  • la rencontre avec les dirigeants de l'Economie sociale et solidaire lors des Rencontres du Mont Blanc, en novembre 2011, au cours de laquelle à été discuté le rôle de l'ESS dans le cadre des négociations de Rio+20
  • la rencontre avec les participants au groupe de travail Biens Communs au cours du Forum Social de Porto Alègre.

Ensuite, ce texte a été travaillé par HELFRICH Silke et Frédéric Sultan qui en a fait une présentation lors du séminaire de préparation du Sommet des Peuples (Rio 2012).

Enfin, l'exploration de ce sujet se poursuit sous la forme d'un projet de publication multimédia Droits en Biens Communs réalisé dans le cadre du prototypage de Remix the commons par SULTAN Frédéric. (Voir le projet et les capsules vidéos sur le site Remix the commons)


Droit des communs / Our Right to the Commons

Proposition pour le Sommet des Peuples Rio+20 présentée par GT Commons, FST

Contacts : Fréderic Sultan : fredericsultan/at/remixthecommons.org

A Rio+20, la (re)connaissance des biens communs ne suffira pas.

Il faut que Rio+20 soit un espace de revendication du Droit des (biens) communs1 et de la recherche des formes et des espaces de leur institutionnalisation.

Les biens communs (commons/ comunes) correspondent à un ensemble de besoins humains fondamentaux. Protéger, créer et partager les ressources qui n'appartiennent à personne individuellement est vital pour l'être humain à l'échelle individuelle, de la communauté ou global. Les ressources sont de diverses natures. Les formes d'appropriation et de partage de ces ressources sont plurielles. Et elles dépassent la dichotomie privatisation et marchandisation ou nationalisation et services publics. "On parle de « bien commun » chaque fois qu'une communauté de personnes est unie par le même désir de prendre en charge une ressource dont elle hérite ou qu'elle crée et qu'elle s'auto-organise de manière démocratique, conviviale et responsable pour en assurer l'accès, l'usage et la pérennité dans l'intérêt général et le souci du 'bien vivre' ensemble et du buen vivir des générations à venir2. Pour exercer nos droits des biens communs, nous avons besoin que cette diversité soit reconnue et instituée.

La prise en considération des biens communs ne se réduit pas à une rhétorique utopique sur le partage et le libre accès universel de tous à tout. Elle suppose de préciser ce qui est bien commun, et donc conduit nécessairement à un débat sur les valeurs. Elle suppose aussi une déclinaison en droits, différents selon les biens, les communautés concernées et les contextes. Elle exige des institutions de différentes natures, à différentes échelles: de la communauté de base aux institutions onusiennes. Le Sommet des peuples est une étape dans la définition des biens communs – pas seulement comme « ressources à partager » mais comme paradigme alternative. Et le Sommet devrait être aussi un espace – et pour la revendication du droit des biens communs.

Le droit des biens communs

Le droit des biens communs que nous revendiquons est un droit fondamental et inclusif de l’être humain vivant en harmonie avec la nature.

Il recompose des droits fondamentaux tels que, le droit à un accès équitable aux ressources, les infrastructures et les espaces sociaux, le droit de créer, recevoir, partager conserver (protéger), donner, reproduire des ressources matérielles et immatérielles de sa communauté, le droit à l'autonomie et la reconnaissance du pluralisme des modes d'organisation des communautés, le droit au respect de la diversité culturelle et la reconnaissance de la pluralité des formes d'organisation et d'économie, le droit d'accéder aux informations et de participer aux processus décisionnels concernant les ressources touchant à la vie et au développement de la communauté. Cette énumération n'est pas limitative.

Le Droit des biens communs constitue à la fois une énumération de droits et une hiérarchisation dans la pyramide des normes.

Il regroupe des droits relevants de différents registres (hiérarchisation) tels que :

  • Le registre de l'accès :
    • droit à un accès équitable à l'eau, à l'énergie, à la connaissance, à la communication, la santé, l'éducation, …
    • droit de glaner, ....
    • ...
  • Le registre de la protection et de la contribution :
    • droit au partage, à la copie, à la reproduction
    • droit au refus de l'exploitation d'une ressource
    • droit au principe de précaution
    • droit à la neutralité de plateformes et des infrastructures
    • droit à la pluralité des formes d'action collective
    • droit à la pluralité des formes de propriété
    • ...
  • Le registre de la participation :
    • droit à l'autogestion par la communauté
    • droit au travail digne dans le respect de la diversité des cultures
    • droit d'accès à l'information sur l'usage des ressources
    • droit à la transparence
    • droit de participer aux processus décisionnels concernant les ressources touchant à la vie et au développement de la communauté
    • droit et responsabilité de protéger les biens communs mondiaux

...

Le Droit des biens communs est à la fois le droit des personnes et des communautés.

Et il est un pré-requis à l’exercice des autres droits de l’être humain. C'est le droit de chaque communauté de voir reconnus l'intégrité et le caractère inaliénable de ses ressources et sa responsabilité pour en assurer l'accès, l'usage et la pérennité de manière démocratique et conviviale, dans l'intérêt général et le souci du 'bien vivre' ensemble et des générations à venir.

Le Droit des biens communs est un ensemble vivant de Droits humains. Il se développent simultanément dans différents espaces de la société.

L’approche est par nature évolutive et inclusive. La coexistence des formes de production, de conservation et de partage des ressources plurielles implique une reconnaissance d'intérêts qui peuvent être contradictoires et la recherche d'un juste équilibre entre les parties. La nature et le périmètre du droit des biens communs se définissent en relation avec les pratiques existantes et des revendications des « commoners ». Les initiatives populaires d'autogestion, les différents espaces de mobilisation pour la résolution ou l’amélioration d'une question particulière, les luttes sociales, les pratiques de l'ESS (économie sociale et solidaire), qui ne se situent ni totalement dans le secteur public, ni totalement dans le marché, fondent des règles, des normes qui contribuent au droit des biens communs.

Créer les conditions d'une mise en oeuvre effective du droit des biens communs

« Les Nations unies devraient être le lieu de la reconnaissance des communs et de leur traduction en termes de droits inaliénables»3 Mais cette reconnaissance exige des institutions de différentes natures et à différentes échelles, afin de permettre d'instituer l'innovation (juridique) des communautés.

Il y a déjà de nombreux espaces institués dans les lois nationales, dans les normes et les réglementations locales, dans les coutumes ou bien dans les pratiques des communautés. Quelques exemples. En Bolivie, les biens communs sont inscrits dans la constitution. En Italie, "la ville de Naples a créé un département pour les biens communs ; la région des Pouilles a approuvé un projet de loi, certes très controversé, de l’eau publique ; la région du Piémont mène une politique de données publiques ouvertes ; deux projets de loi sur les biens communs ont été déposés au Sénat »4. En Écosse et en, Inde, le droit de défense des biens communs sont aussi intégrés dans les lois organiques. Le droit des biens communs résulte de la convergence de ses instances locales plurielles et de la reconnaissance internationale.

Pour créer les conditions d'un changement global et durable, le droit des biens communs doit être opposable. Il faut sans doute s'inscrire dans les logiques et les pratiques onusiennes et se donner pour horizon la mise en place de mécanismes d'engagement et de suivi des États, ainsi que des espaces de réception et d’examen de plaintes. La mise en place de tels mécanismes est longue et complexe et rencontre souvent des obstacles politiques. D’autant plus qu’il s’agit d’environnements juridiques qui ne visent pas à "nationaliser", ni "multilatéraliser" la gestion des communs, mais à permettre l'investissement de communautés à diverses échelles dans leur régulation selon de formes spécifiques et diverses de leur "mise en commun". Cette approche « permet de dépasser le seul cadre du multi-partenariat où s'imposent des rapports de forces souvent trop disproportionnés. »5

Des propositions existent, telle que le Commons Law Project6 animé par David Bollier, Burns H. Weston, la proposition de la Déclaration Universelle du Bien Commun de l’Humanité (François Houtard7) ou encore à l'échelle de l'Europe, la Charte Européenne des Communs8 pour un droit constitutionnel européen. Il serait utile de reconnaître tous ces outils comme contribution et de les articuler.

Une coalition pour le droit des biens communs

À Rio, nul doute que c'est le Sommet des peuples qui aura pour tâche d'affirmer ces droits et de leur donner un contenu concret9.

Les décloisonnements et les convergences que le paradigme des biens communs permet10 entre les luttes et entre les mouvements, l'économie sociale, les commoners et les acteurs de la transition sociale, culturelle et environnementale, doivent se muer en une Coalition pour le droit des biens communs. Cette coalition peut articuler les mouvements sociaux historiques et émergents dans le sillon des Indignados, des Occupy, les praticiens des biens communs et les théoriciens en rupture avec la pensée dominante et sans lesquels, une somme d’innovations ne produit pas de changement systémique. A long terme, cette coalition devra relever le défi de la reconnaissance du droit des biens communs à l'ONU en se nourrissant des progrès des biens communs à l'échelle locale et dans les différents champs de l'activité humaine.

Notre objectif, à ce stade est bien de créer les conditions d'émergence de cette coalition et de son agenda.

Prochains pas :

  • Utiliser ce document comme base de travail pour rédiger une déclaration de l'assemblée des peuples (Rio+20)
  • créer une commission ad hoc responsable pour donner vie a cette iniciative – de préférence avec la participation de plusieurs GT (du FST 2012) et au-delà (contacter Fréderic et Silke)
  • organiser un rencontre au Sommet des Puebles à Rio pour discuter cette proposition et partager les positions des mouvements sociaux
  • inviter les mouvements sociaux à former une coalition pour travailler dans le cadre de négociations ONUsiennes à venir
  • organiser une rencontre à Rio pour discuter cette proposition et partager les positions des mouvements sociaux
  • autres ...

(rédigé à Paris/Rio 7/05/2012)

Notes et références

1 La question du vocabulaire et des traductions est très importante. On ne peut pas l'évacuer en adoptant tous le vocabulaire anglophone (commons). On retiens ici le "Droit des biens communs", mais on pourrait adopter: Droit de Communauté, Droit à faire Communauté, Droit de faire ensemble, ....

2 AMBROSI Alain, Itinéraires en Biens Communs, http://wiki.remixthecommons.org/index.php/Itin%C3%A9raires_en_Biens_Communs (Remix the commons) 2012.

3 La reconquête des communs, in La nature est un bien commun, pas une marchandise. Non à leur économie verte !ATTAC France 2012.

4 Stefano Rodotà "La valeur des biens communs", Publication originale dans La Repubblica du 05 janvier 2012. Texte traduit et publié avec l’autorisation de Stefano Rodotà : http://paigrain.debatpublic.net/?p=4401

5 Hervé Le Crosnier, correspondance personnelle

6 Commons Law Project : is an ambitious project to re-imagine the law of the commons based on actual precedents in history and link it to the existing Human Rights framework. A law of the commons is a necessary legal foundation for challenging existing laws and economic practices and provides a set of legal principles to ensure the human right of commoners to a clean, healthy, ecologically balanced, and sustainable environment—a right that is, regrettably, weak in contemporary law.

7 François Houtard http://www.cetri.be/IMG/pdf/bien_commun_de_l_humanite.pdf

8 http://www.commonssense.it/

9 La reconquête des communs, in La nature est un bien commun, pas une marchandise. Non à leur économie verte !ATTAC France 2012.

10 Voir les mouvements occupy, indignados, manifestation pour les biens communs à Montréal le 22 avril 2012.